Capucine Cousin est revenue en détails sur la question de l’abattement fiscal des journalistes et dénonce le procès instruit publiquement et politiquement contre cette fausse “niche fiscale”. Je m’associe à elle dans son argumentation, et vais même y ajouter quelques arguments.
Avant tout, je précise que cette question m’a taraudé dès les premiers jours de l’obtention de ma carte de presse, il y a une quinzaine d’années et que je ne déclare plus l’abattement fiscal, le journalisme n’étant plus mon « activité principale et rétribuée » (je fais surtout du conseil et de la formation).
Ayant suivi les cours d’Histoire de la Presse à l’excellent Institut français de Presse, je savais qu’à l’origine, cette subvention directe aux journaux avait été imaginée en 1934, pour contrer les excès d’un journalisme soumis aux puissances d’argent, comme une garantie d’indépendance, à l’anglo-saxonne.
Il s’agissait de rembourser les frais des journalistes dans l’exercice de leur métier pour ne pas les rendre sensibles aux “cadeaux” offerts par ceux dont ils parlaient, ce qui aurait pu orienter la teneur des articles.
Et donc, voyant mes petits camarades profiter grassement des invitations, petits fours et autre danse du ventre communicante, et désireux d’en profiter aussi, je m’étais fait un devoir de ne pas déclarer d’abattement fiscal, en plus. Ok pour arnaquer un peu les communicants (car les malheureux annonceurs n’ont pas bénéficié avec moi d’un grand régime de faveur), mais pas le contribuable.
Et puis surtout je n’avais pas embrassé cette profession pour me mettre à faire exactement le contraire que ce que je dénonçais. Il y a des limites à l’incohérence idéologique.
Sont passées quelques années durant lesquelles j’ai pu mesurer combien cet abattement servait surtout de subvention aux éditeurs de presse, pas aux journalistes. J’ai découvert en effet combien cet abattement (50 000 francs à l’époque, 7650 euros aujourd’hui à retirer de son revenu imposable) en fait un moyen de contrôler et limiter les augmentations de salaire.
De même d’ailleurs que la carte de presse, officiellement un morceau de plastique censé « faciliter les relations des journalistes avec l’administration » (et notamment fiscale), sert avant tout de compensation sociale à la faiblesse des salaires. “Ouhais, moi je rentre gratos dans tous les musées et je me la pète au restaurant quand je sors ma carte bleue qui est à côté”. C’est également une subvention aux éditeurs de presse déguisée. J’ai donc un jour moi aussi demandé à bénéficier de cet abattement pour compenser un peu mon salaire de miséreux (7600 francs nets en 1996)
Capucine a dressé l’inventaire des salaires bruts 2008 en provenance du SNJ (pas plus récent) et montre qu’une bonne partie des journalistes ne roule pas vraiment sur l’or : près de 28% des journalistes gagnent moins de 2500 euros /mois, soit un peu moins de 2000 euros nets. Cela n’a rien de scandaleux eu égard au niveau de diplôme de la profession.
En 2008, 14,8% des journalistes sont passés par l’une des douze écoles reconnues de journalisme. Je n’ai pas trouvé de chiffres plus récents, mais ceux de 1998 (ça date) montrent que 60% des journalistes sont à bac+3. Il est fort probable qu’on soit aujourd’hui à bac+4
Il faut ajouter à cela 16,4% de pigistes payés au lance-pierre pour la plupart (37% des journalistes pigistes gagnaient moins de 1500 euros bruts par mois rappelle Capucine). Donc la moitié des journaleux sont soit dans la précarité, soit bénéficient d’un niveau de vie plutôt faible.
NE PAS TOMBER DANS LE PIEGE DU NIVELLEMENT PAR LE BAS
Je comprends l’argument de ceux qui me disent : les journalistes ne sont pas les plus mal lotis. C’est vrai : qu’on pense aux infirmières, aux caissières, aux employés, à certains fonctionnaires…Mais je ne comprends pas bien en quoi cela justifie la hargne anti-journaliste ?
En tant que formateur professionnel des journalistes, je parcours la France pour aller former mes collègues “print” aux techniques web, à l’instar de mon collègue Erwann Gaucher
Le Télégramme, le Courrier Picard, Sud Ouest, Le Messager… Je n’ai vu là que des journalistes gagnant très mal leur vie si l’on tient compte du temps passé. Car ces journalistes ne comptent pas leurs heures et travaillent entre 50 et 60 heures par semaine pour un salaire situé dans la fourchette de 1800 à 2500 bruts (exception faite des rédacteurs en chef payés entre 3000 et 4000 bruts, pour ce que j’en ai vu, mais après 20 ou 25 ans de métier). Si scandale il y a, il n’est pas dans la réduction fiscale dont ils bénéficient, mais plutôt dans l’iniquité de rémunération par rapport aux professions commerciales.
Je me sens tout autant solidaire des infirmières qui réclament une revalorisation de leur salaire, des retraités qui voient leurs pension diminuée, des chercheurs qu’on paie une misère sous prétexte qu’eux au moins font un boulot qui leur plaît.
SALE TEMPS POUR L INTELLIGENCE
Car c’est tout les travers de notre société qui ne récompense pas bien le savoir, mais plutôt le commerce. Je n’ai pas de chiffres sur la moyenne des rémunérations des secteurs commerciaux, mais mon expérience suffit à m’en convaincre. Pour gagner sa vie correctement, il faut faire de la vente, pas des études.
Et c’est cela qui m’inquiète à travers ces invectives à destination des journalistes et leurs avantages iniques. Enlevez-le et pourquoi pas non plus la carte de presse et vous verrez fuir les élites, les talents vers d’autres métiers. On n’attrape les mouches avec du vinaigre.
Il risque alors de se produire ce qui se passe déjà dans le secteur de la recherche : une fuite des cerveaux vers des climats plus cléments (aux Etats-Unis par exemple ou les post-doc sont payés le double d’ici parfois) ou pour le cas des journalistes, vers la communication plus généreuse. Or, retenir les talents, c’est vital pour notre démocratie.
UNE REFORME NECESSAIRE DE L AIDE
Mais je comprends aussi l’importance du symbole et surtout, l’hérésie de l’absence de critères sociaux dans l’attribution de cette aide. Il est vrai qu’un journaliste gagnant 3500 euros nets par mois, doit payer des impôts”normaux”, c’est une question de civisme républicain.
Alors cela passe par la mise en place de critères sociaux, par la réintégration dans le régime général avec revalorisation de salaire (subventionnée directement par l’Etat). Facile à dire tout cela, quand l’Etat manque cruellement de trésorerie.
Cela évitera de subventionner des “rédacteurs-graphistes” qui n’ont de journaliste que le numéro de Commission paritaire de la société qui les emploie.
Il faut réformer en effet le statut de journaliste pour éviter que la population ne s’éloigne de plus en plus de ses médiateurs. Intermédiaires dont elle a besoin, même si elle ne s’en rend pas toujours compte. Il faut certes aussi que de leur côté que les journalistes donnent l’exemple et regagnent cette confiance qu’ils ne méritent pas toujours, compte tenu de leur élitisme et corporatisme récurrents.
Par ailleurs, cessons de jouer la concurrence des souffrances et des misères. Cela me rappelle trop le malsain coup de gueule de Pierre Bergé contre le téléthon, ou encore le méchant procès de Dieudonné contre les Juifs par comparaison aux anciens esclaves africains.
Ce débat est indigne et vide et ne conduit qu’à dresser les gens les uns contre les autres. Attention à ce piège machiavélique, au premiers sens du terme.
Enfin, attaquons aussi et d’abord les injustices les plus criantes : bouclier fiscal, niches immobilières déficalisées, avantages parlementaires, statuts de nantis (Banque de France etc)
L’un n’exclue pas l’autre, certes, mais ce sera plus efficace et plus juste.
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Cyrille Frank
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Crédit photo via Flickr.com ©Jenw2012 et lorelei-ranveig
C’est une nouvelle preuve du paradoxe social français.
Ce culte de l’avantage acquis.
Comme les cheminots dont la retraite à 50 ans était justifiée par les conditions de travail épouvantables et qui se battent pour un maintien du privilège alors que la cause a disparu.
Comme le régime intermittent justifié par l’exception culturelle française.
Si les éditeurs de presse utilisent cet avantage pour justifier les bas salaires, si les entrepreneurs du spectacle utilisent le régime Assédic comme soupape pour ne payer les intermittents que 6 mois sur 12, certes c’est scandaleux, mais pourquoi le faire supporter par la communauté des contribuables qui payent leur IR comme l’entrée au Louvre plein pot?
Même avec cet avantage, la presse française se casse la gueule depuis des années et plutôt que de secouer le spectre de la fuite des cerveaux, il faudrait peut-être réfléchir à un autre modèle de journalisme pour ‘éviter que la population ne s’éloigne de ses médiateurs’.
Merci de poursuivre le débat ici… 😉
Moi je ne parle pas d’avantages acquis, ce n’est pas du tout mon propos.
je suis bien d’accord qu’il faut être souple et tenir compte des évolutions des modes de vie, le raidissement syndical j’y suis fortement opposé, d’autant plus que cela ne sert pas forcément les intéressés sur le long terme (cf délocalisations)
Cet impôts sert à financer les services « publics » d’information et de culture, même si les entreprises sont privées pour partie, c’est l’idée. Sans ces subventions, il n’y aurait plus de cinéma français. Sans cette aide, il n’y aurait pas l’AFP.
Je suis d’accord avec votre dernier item : il ne suffit pas d ‘aider. Il faut aussi que les éditeurs de presse se bougent, innovent etc. C’est pourquoi je milite pour un meilleur contrôle de ces aides.
J’ai peur d’une société d’information Berlusconienne; Le marché seul en matière culturel, c’est pas joli, joli… Mais d’un autre côté, tout est question de mesure : trop de subvention mal contrôlée a conduit à l’immobilisme de la presse. Pourquoi se fatiguer ? Cela s’appelle le marché régulé : ni trop l’un, ni trop l’autre…
Cet abattement ne finance pas le service public de la presse puisque tous les journalistes y ont droit (même ceux qui ne quittent pas leur bureau de la journée et ne font plus ce journalisme d’investigation/de terrain qui fait tant défaut à notre presse).
L’indépendance de la presse est-elle garantie pour autant lorsque (à de rares exceptions près) la principale source de revenus des journaux sont les annonceurs dont les réclames directes ou indirectes grignotent de plus en plus le contenu éditorial?
J’en doute. J’ai plusieurs très proches relations dans la presse féminine et elles me disent souvent que la marge de manœuvre vis-à-vis des annonceurs est mince : en gros si tu n’aimes pas quelque chose, ta seule façon de le signifier est de ne pas en parler. C’est limite l’annonceur qui a le final cut quand tu parles de lui!
Déontologique tout çà? Pourtant ces journalistes encartés bénéficient des avantages du statut comme les autres.
Je ne suis pas d’accord avec toi : l’abattement n’est pas un impôt. Ce n’est pas de l’argent prélevé et redistribué. C’est une des nombreuses illustrations de ce syndrome français de donner des avantages au lieu de donner de l’argent : le CE, les congés supplémentaires, les abattements…tout çà c’est une façon de rétribuer sans payer.
Ce que je voulais dire c’est que cet abattement est une survivance du passé. La société a évolué et il n’est plus en phase avec notre temps.
Et puis s’il y a des pigistes qui crèvent la dalle c’est aussi le cas des stagiaires perpétuels, des temps partiels, des CES, de tous ces petits boulots à la con dans d’autres branches qui pourtant ils ne sont pas aidés.
Bonjour,
Beaucoup de choses justes dans l’analyse du symptôme, mais nous n’en tirons pas les mêmes conclusions.
« même ceux qui ne quittent pas leur bureau de la journée et ne font plus ce journalisme d’investigation/de terrain qui fait tant défaut à notre presse »
> C’est pareil pour tous les services publics 🙂 Mais si rappelle-toi ce guichetier d’une administration qui en fichait pas une rame… La question de l’efficacité de ces services publics se pose, mais remets-tu en cause leur existence ?
> « la marge de manœuvre vis-à-vis des annonceurs est mince »
Oui ce que tu dis est juste, en particulier dans la presse féminine, je confirme. Pour éviter ces dérives de la publicité, que préconises-tu ? Un financement à 100% public ? En ce cas, es-tu prêt à payer plus d’impôts pour le financer ? Si c’est le cas tu es une exception qui ne financera pas à elle seule le système
Ou bien préfères-tu abandonner les journaux à leur sort, sans aide du tout ? Préparons-nous alors à voir mourir les quotidiens nationaux et les 3/4 de la presse régionale. Et habituons-nous aux chaînes de Tv italiennes, cela nous donnera un avant-goût de ce qui nous attend en termes de ligne éditoriale.
A moins tu n’optes pour un système d’info privé à 100% payant comme Médiapart ? En ce cas, tu mets de côté les 4/5e de la population. Ce n’est pas ma conception de la République.
« Je ne suis pas d’accord avec toi : l’abattement n’est pas un impôt. »
Exact, mais en gros cela revient au même, c’est de l’argent qui n’entre pas dans les caisses de l’Etat.
« tout çà c’est une façon de rétribuer sans payer. »
> Oui, et alors ? Ce sont des économies administratives énormes, plutôt que verser de l’argent qui sera reversé ensuite etc. Je trouve cela très bien au contraire, comme serait très efficace le prélèvement à la source qui économiserait tant de frais administratifs.
« abattement est une survivance du passé »
> Exact. toute la question est de savoir comment réformer le système. Je dis que le supprimer simplement causera des dommages collatéraux importants sur la presse et sur l’information en général.
« Et puis s’il y a des pigistes qui crèvent la dalle c’est aussi le cas des stagiaires perpétuels, des temps partiels, des CES, de tous ces petits boulots à la con dans d’autres branches qui pourtant ils ne sont pas aidés. »
> Ceci correspond à mon paragraphe sur la mise en concurrence des souffrances. Que veux-tu ? Qu’on s’aligne sur le plus petit dénominateur commun ? Vision soviétique de l’alignement par le bas.
Je préfère par le haut, dans la mesure du possible.
Belle synthèse 🙂
Tout d’abord, merci de remettre un peu de perspective historique à cette aide qui parait bien saugrenue pour un non journaliste comme moi.
Quand bien même la situation de nombreux journalistes est difficile, je reste néanmoins toujours opposé, par principe, à tout type d’aide de ce type qui sont, il faut le dire, de pure inspiration corporatiste.
Peu importe qu’il s’agisse de journalistes ou d’infirmières ou autres ! (on peut juste reprocher aux journalistes un curieux silence à propos de leur statut alors qu’ils ne se privent pas de critiquer les autres – c’est le paradoxe de la profession et il y a heureusement des exceptions à ce sentiment très péremptoire)
Mais revenons sur cette aide.
Ma vision des choses est qu’il est toujours injuste d’accorder des aides à une catégorie spécifique car cela revient avant tout à ne pas donner à d’autres qui le mériteraient tout autant. Et je ne cherche pas à comparer les journalistes à d’autres, c’est juste une question de logique : à moins d’être totalement universelle, une allocation/compensation évince toujours d’autres qui mériteraient une aide mais « ne rentrent pas dans les cases ».
C’est exactement cela que dénonce Yann Algan et Pierre Cahuc dans « la société de défiance », ou comment le système social français s’autodétruit. L’octroi d’aides, de statuts etc. vont à l’encontre de l’égalité et l’universalisme du système, ce qui favorise la défiance entre les citoyens et envers les institutions (et génère donc de l’incivisme). « Pourquoi payer mes impôts alors que d’autres bénéficient de privilèges? » : tel est le raisonnement classique d’une société de défiance.
Mais bien sur, ma position sur ce sujet est donc très dogmatique et ne concerne pas que les aides aux journalistes mais l’ensemble du système qui est pensé « au cas par cas ».
Je note que tu proposes des améliorations de court terme qui sont aussi évidentes que souhaitables. Ca serait déjà une bonne étape, le problème etant que lorsqu’un aide est accordée, il y a toujours un effet cliquet qui fait qu’il est difficile de la retirer, ne serait-ce qu’en partie.
Voilà pourquoi je suis par principe contre cette aide. Bien sur, en pratique il est difficile de changer de système. La seule solution serait probablement l’instauration d’un revenu universel (ce pourquoi je milite d’ailleurs). Ce système pourrait potentiellement répondre à beaucoup d’autres problèmes d’ailleurs que rencontrent actuellement toutes les professions intellectuelles. Mais c’est un très vaste débat…
Merci en tout cas pour ce papier 🙂
A Stan : beau commentaire 🙂
Tu n’y es pas, ce n’est pas une inspiration corporatiste. C’était une vision gaullienne traumatisée par la presse de la fin XIXe s (relire Bel ami de Maupassant) et celle des années 40, collabo. Il ne souhaitait en aucun cas privilégier les journalistes.
Oui les journalistes se font discrets là dessus je te l’accorde. Et beaucoup touchent indûment cette aide tout en votant à gauche et en donnant des leçons. Cela est vrai de toutes les professions, les gens bien cela ne court pas les rues finalement, en presse comme ailleurs.
Ne confondons pas tout, il faut comparer ce qui est comparable. On a vite fait d’appeler « privilège » ce qui est une compensation correspondant à un choix de vie. Par exemple le fait que les enseignants soient très mal payés par rapport à leur niveau de diplôme est compensé par leurs congés plus longs. Privilège ? En ce cas payons-les comme dans le privé ?
Mais cela veut dire beaucoup plus d’impôts… ahhh c dur tout ça.
Un revenu universel ? Quelle est ton idée ? Qui finance et comment ?
ça a l’air intéressant…
Merci à toi pour ce commentaire (et j’ai ds l’idée qu’il y en aura d’autres…)
Je comprends le point de vue et je le partage en partie. Il est vrai qu’il faut une équité, une justice de traitement entre citoyens, c’est vital pour maintenir le pacte républicain. Mais toutes les professions ne sont pas identiques, surtout en matière culturelle, il est délicat de leur appliquer les règles pures du marché.
Le terme « privilège » est bien sur un brin provocateur, même si notre système, à force de vouloir aider tout le monde aboutit à système fortement corporatiste.
Sur le cas précis de cette aide, je suis certes allé un peu vite, car les raisons d’origine de cette aide sont autres comme tu l’explique bien. Mais au final, on a bien sous les yeux un exemple d’avantage qui ne profites qu’à certains. (donc : pas bien !)
Alors certes, le cas des journalistes est un peu spécifique comme toi et Capucine l’avez montré. Je suis presque prêt à l’admettre comme un « mal nécessaire » dans l’état actuel. Mais il y a peut être d’autres voies à explorer… le revenu universel 😉
Le revenu universel (ou revenu citoyen, revenu de base, revenu de vie, allocation universelle…) est une vieille idée qui commence néanmoins à connaitre un certain engouement un peu partout (à droite comme à gauche). L’idée est simple : tout le monde, en tant que citoyen reçoit un revenu égal et ce sans aucunes conditions.
Les avantages sont multiples : cela permettrait tout d’abord de donner aux salariés la chance de choisir leur travail, plutot que de le subir comme c’est trop souvent le cas aujourd’hui. Dans le cas des professions intellectuelles (artistes, journalistes), cela est particulièrement intéressant car il permet de recevoir une rémunération y compris lorsqu’aucune oeuvre est « produite ». En quelque sorte, une manière de rémunérer l’inspiration…
Cela permettrait également de réduire considérablement les couts de l’administration par un système social beaucoup plus simple.
Pour le financement, il y a plusieurs propositions dont voici les principales que je retiens :
– financement par création monétaire : on parle alors de « dividende universel » voir à ce sujet : http://fr.wikipedia.org/wiki/Dividende_universel_(cr%C3%A9ation_mon%C3%A9taire)
– financement par TVA, c’est le revenu de base. voir à ce sujet cette excellente vidéo : http://www.creationmonetaire.info/2010/10/le-revenu-de-base-traduit-en-francais.html
Bref, l’idée peut paraitre utopiste, mais moyennant un peu de volonté politique et une vision progressiste de la société, cela est loin d’être irréalisable…
@Stan Je ne suis pas partisan de la stricte équité dans une société. Ce modèle parfaitement égalitaire par l’attribution des mêmes services, des mêmes bienfaits conduit aux pires totalitarismes car elle nie les diversités. Ce modèle de société est celui inventé par Platon dans sa « République » et plus tard mis en place par les communistes soviétiques.
C’est pour cela que je ne suis pas d’accord avec toi quand tu dis : « un avantage qui ne profite qu’à certains : pas bien »
Il faut replacer l’avantage dans son contexte et comparer l’ensemble : temps de travail, rémunération, insécurité, conditions de travail… A ne se focaliser que sur tel ou tel aspect, on n’est pas juste.
Moi,je milite pour la diversité, mais équilibrée. C’est à dire supprimer les avantges excessifs, mais pas forcément tous, car certains correspondent à une compensation et des choix de vie. Que les profs mal payés aient plusieurs mois de vacances ne me choque pas. Ce qui m’ennuie, c’est quand ils se plaignent de leur salaire… On ne peut pas jouer sur tous les tableaux à la fois…
Ton revenu universel ? Je crains qu’il ne tienne compte d’un aspect humain important : le besoin de compétition. On se plaint beaucoup de cela de nos jours, car il y a un excès. Mais c’est un réel besoin humain de dépasser l’autre, de le battre, d’être meilleur. Les gens ne veulent pas simplement être heureux, ils veulent aussi être plus heureux que le voisin.
On peut le regretter dans l’absolu, mais je doute qu’on puisse y faire grand chose.. Faut-il d’ailleurs le regretter ? Non, car c’est aussi un moteur important de création. Voir la force motrice des religions (je suis athée, je n’en fais pas le panégyrique)
Bon là nous touchons à la philosophie, comme toujours quand on creuse un peu en politique 😉
Le revenu minimum universel je crois que c’est Roseline Bachelot qui a remis l’affaire au goût du jour.
Paul Aries (gauche antiproductiviste)dans le Sarkophage en a aussi donné sa vision (je crois que c’était dans un des premier numéro).
En fait, l’idée est de prendre la somme d’aide sociale et le coût pour la faire fonctionner (pôle emploi, caf, RSA, RMI, etc) et de la diviser entre tout les ménages.
Si j’ai bonne mémoire, on arriverait à un truc comme 600 euros/ménage à moins que ce soit un seuil financier tolérable, je ne sais plus
Bref en tout cas, l’idée est de donner un minimum qui serait viable à chaque ménage à partir :
– de la somme globale que représente l’aide sociale.
– financer le reste par un impôt sur le revenu surtaxé.
Ce n’est pas à à priori antinomique de l’esprit de compétition… juste celui qui un temps de sa vie ne veut rien faire, peut ne rien faire… tout en disposant d’un minimum viable.
C’était le même principe qu’on retrouvait dans la flexi-sécurité qui a vite disparu du langage.
Sans entrer que dans les considérations économistes où je ne suis pas très à l’aise… un peu de libéralisme politique dans le droit du travail ne ferait pas de mal :
Ton patron te fais chier ? Et ben tu te casses, plus de carence, plus de pression sociale… tu sais que tu vas boucler tes fins de mois…. Et là on verrait si les salaires ne repartent pas tous seuls à la hause 😉
Bon voilà, j’avais décidé de ne pas squatter tous tes articles et bien c’est raté 🙂
Mmm, intéressant, merci d’avoir poursuivi la réflexion que j’avais engagée à ce propos sur mon blog.
Pour ma part, je militerais pour assortir cet abattement fiscale à des conditions de ressources, avec un plafond maximal de revenus pour y avoir droit. S’i lest normal que les journalistes à petits salaires (pigistes, débutants, journalistes en presse régionale – dont tu soulignes avec justesse les salaires parfois très bas) on peut se demander s’il est normal que des journalistes à revenus très confortables (souvent à des postes à responsabilité) en bénéficient…
Je t’en prie Capucine,
Je n’allais pas te laisser seule te débattre face à ce « tabou »… 🙂
Tout à fait d’accord, c’est ce que j’entendais par « réintégration de critères sociaux ».
A bientôt
Non je crois que tu comprends mal l’idéologie derrière ce concept. Il s’agit davantage de donner une égalité de moyen, une égalité des chances.
Aujourd’hui vivre sans un minimum d’argent revient à ne pas exister.
De fait, il ne s’agit pas de créer une société ou tout le monde serait égaux in fine. Mais simplement reconnaitre un droit à vivre et participer à la société. Après nul doute que ceux qui veulent gagner plus le pourront. Ceux qui voudront regarder la télé le pourront aussi. Ils seront juste probablement malheureux.
En fait tout dépend du niveau du revenu que l’on fixe et de l’incitation à travailler qu’elle génère.
Et si tu regardes, le RSA est déjà un pas vers cette voie. Sauf qu’actuellement on dépense des milliards pour que le système marche, que certaines personnes en sont exclues, et que l’on crée de l’assistanat qui nuit au travail.
Je comprends tes réticences, elles sont classiques, mais je t’assure que ce n’est pas si simple que ça de balayer l’idée du revers de la main 😉
Je ne peux que tu conseiller de regarder la vidéo sur le revenu de base si ce n’est pas déjà fait (lien ci dessus). Tout y est ou presque.
Bon WE 🙂
Stan,
Je vais regarder avec attention. On en reparle…
Bon week-end aussi 🙂
Défense corporatiste des avantages acquis. As usual.
Pierre, je pense que vous n’avez pas bien lu mon papier…
Il ne s’agit pas d’un avantage acquis mais d’une compensation, un sparadrap si vous préférez. La question n’est pas de préserver à tout prix une mesure sociale sous le prétexte de l’Histoire. Je ne raisonne pas de cette façon. En revanche si on doit supprimer cet abattement fiscal, il faut rééquilibrer les salaires (sur critères sociaux) sinon c’est cela conduira à l’abandon des meilleurs journalistes, comme dans la recherche française.
Méfions-nous des solutions simples et dogmatiques. Il y a souvent des effets de bord qui n’étaient pas forcément visibles.