NPA Consulting présentait mardi 16 avril 2013 ses nouveaux outils de mesure en télé sociale. Le cabinet y livrait ses « clés » de compréhension du phénomène. L’occasion de mettre à mal quelques idées reçues sur la télévision sociale.
76 % des personnes regardent désormais la télévision avec un smartphone ou une tablette dans les mains. Le développement du « second écran » dont certains estiment d’ailleurs qu’il est devenu le premier explique l’engouement actuel pour la social TV.
LA CONVERSATION SE DEVELOPPE SUR LES RESEAUX
Le nombre de tweets en rapport avec un programme télé s’est élevé à 8,2 millions en mars 2013. Cela représente une augmentation de 270%, en moins d’un an (environ 3 millions de tweets échangés sur la tv en juin 2012 – Source Mesagraph). Le record du nombre de tweets échangés autour d’une émission s’élève à 1,5 millions, lors des NRJ Music Awards.
691 000 personnes ont laissé au moins un commentaire sur Twitter en mars 2013, soit +80% par rapport à juin 2012.
Les pages Facebook des 7 principales chaînes ont augmenté leur nombre de fans de 87% en moyenne entre avril 2012 et avril 2013.
NPA a totalisé un million de tweets sur une semaine toutes chaines confondues et un million d’interactions sur Facebook autour de programmes tv (50 pages – parmi les plus grosses – analysées sur 500, ce qui laisse une marge).
Philippe Bailly, fondateur du cabinet insiste aussi sur la période de forte innovation actuelle. Nous assistons à une phase d’enrichissement sur Twitter mais aussi sur Facebook, de développement des applications des chaines, de bouillonnement et d’innovation, et l’intérêt du public croît sur ces services.
LA SOCIAL TV NE SE RESUME PAS A TWITTER
La social TV, ce n’est pas que du chat collectif en direct autour d’émissions de télé-réalité ou de matchs de foot.
C’est certes l’un de ses aspects, à l’instar de The Voice, qui via l’application My TF1 connect, accentue la viralisation en direct des contenus (partages d’extraits, commentaires, likes)
Mais c’est aussi des interactions variées avec le téléspectateur, comme en témoignent les exemples ci-dessous :
– Hawai 5-o fait voter les internautes pour déterminer qui est le coupable et modifier la fin du feuilleton selon le vote du public.
– Canal + utilise le second écran (tablette) pour permettre au téléspectateur de changer en direct l’angle des caméras diffusant les matchs de foot, de voir les ralentis, de noter les joueurs…
– France Televisions, lors du tournoi de tennis de Roland Garros, offre des contenus additionnels telles les statistiques des matchs, les fiches détaillées des joueurs…
– La série Borgia propose un jeu immersif sur tablette et mobile. Celui-ci ne se déroule pas pendant la série, mais avant ou après, pour prolonger l’expérience télévisuelle dans le même univers. Contrairement à ce que l’on croît souvent, la social tv ne se résume pas au live.
LES CINQ CRITERES DE SUCCES DE LA SOCIAL TV
- L’horaire : celui-ci doit être plus tardif, 38% des interactions sociales ont lieu après 23 heures.
- La chaîne : certaines, de par la nature de leurs programmes et l’attention portée aux dispositifs sociaux, sont plus en avance que d’autres. C’est le cas de Tf1 qui représente 40 % des interactions sociales de l’ensemble des programmes télé.
- Le genre : le divertissement et notamment la télé-réalité, représente 35% des interactions sociales.
- Le facteur générationnel : la social Tv fédère un public jeune, voire très jeune (12-17 ans). C’est la nouvelle cours de recréation.
- Les invités comme Justin Bieber sont des relais forts.
LES LEVIERS POUR SUSCITER L’ENGAGEMENT
- Déployer un dispositif antenne : l’affichage des tweets des téléspectateurs, une sélection en direct ou non des questions posées sur Twitter, Facebook ou le site de la chaîne.
- Se servir d’animateurs-ambassadeurs : développer les comptes sociaux des animateurs eux-mêmes, porte-étendards de la chaîne et lien plus personnel avec l’audience.
- Jouer la dramaturgie tv : la scénarisation de l’émission et la façon de susciter de l’intensité dramatique (suspense, émotion, polémique…) jouent fortement sur l’engagement social de l’audience.
- Proposer une application compagnon augmente la participation du public qui se voit proposer beaucoup plus de possibilités interactives (votes, réactions, partages, likes…)
- S’appuyer sur les influenceurs : la conquête des « leaders d’opinion » sur chaque communauté d’intérêt se révèle précieuse pour susciter l’interaction du plus grand nombre.
Cannes!!! #KISS #NMA2013 #NRJmusicawards instagr.am/p/U7EoOJqVnw/
— Carly Rae Jepsen (@carlyraejepsen) 25 janvier 2013
- Promouvoir fortement le site officiel (ex. The Voice)
COMMENT SE COMPORTE LE TELESPECTATEUR ?
NPA a identifié trois principales postures devant la social tv :
- La posture sociable : je suis là, je retwitte, je suis présent.
- La posture fan : mobilisation derrière une équipe, un candidat, un chanteur…
- La Posture opinion : juge, ironie, critique, débat… position plus distante par rapport à l’émission (on reconnaît là l’esprit volontiers railleur de Twitter)
L’audience sociale suit le cycle de vie du programme lui-même et les moments forts de l’émission durant la saison (invités populaires, clash retentissant…)
Il y a une analogie forte entre audience globale et engagement social du public, ce qui donne à l’analyse conversationnelle une capacité prédictive. Les courbes se ressemblent (les forts creux correspondent aux coupures de publicitaires, les pics aux temps forts du programme).
L’audience la plus « socialement active » est celle des 15-34 ans. Forte part de voix de tf1 (40%). Les domaines porteurs : le divertissement, le sport, la politique et un peu de cinéma (Harry Potter, Les petits mouchoirs)
QUELLE EFFICACITE SUR L’AUDIENCE ?
A l’échelle d’une diffusion, y a t-il une corrélation entre activité sociale et audience télé ?
NPA a analysé plus de 600 programmes sur un an. Il en a déduit qu’en France 11% de buzz se traduisait par un point d’audience tv. Aux Etats-Unis, 8,5 % de buzz correspondrait selon ses calculs à 1% audience sur la cible 18-34 ans.
Ce calcul rejoint les évaluations récentes de Nielsen
- chez les 18/24 ans, une hausse de 8,5% du volume de tweets se traduit par une augmentation de l’audience de 1%.
- chez les 35/49 ans, c’est une hausse de 14% du volume des tweets qui entraîne une augmentation de 1% de l’audience.
Encore faut-il être très prudent et distinguer corrélation et causalité, car d’autres facteurs entrent en ligne de compte : l’investissement publicitaire et les audiences de l’année précédente, comme le rappelle Pascal Lechevallier
Mais, outre le recrutement, l’intérêt et l’enjeu de Twitter est aussi d’engager les téléspectateurs pour limiter le zapping et accroître la fidélité des communautés. Un facteur de qualité de l’audience, indépendamment de la puissance.
LES OUTILS NPA DE MESURE DE LA SOCIAL TV
NPA nous a surtout fait venir pour ça : nous présenter son outil comparatif de l’efficacité des programmes sur le plan de l’interaction sociale avec leur audience. Le baromètre du cabinet d’études cherche à mesurer trois choses :
- L’engagement actif : la puissance multi-univers des émissions ou des chaînes, tous réseaux confondus.
- La résonance numérique : l’impact réel sur les réseaux sociaux en éliminant la duplication (multi-postage sur réseaux par un même compte par ex.) et les facteurs limitants comme le Edgerank de Facebook qui ne diffuse en moyenne que 16% des posts de ses membres.
- Le score d’engagement d’une émission en fonction de son audience. Un étalonnage basé sur les chiffres Médiamétrie de la tranche 11-49 ans qui représente 95 % de l’audience. Un score de 74 signifie qu’il y a 74 interactions pour 1000 téléspectateurs de 11-49 ans.
Le cabinet NPA a également présenté un outil de mesure qualitative de la pige presse (articles élogieux, audiences, polémiques, buzz en amont ou en aval de l’émission), ainsi qu’un baromètre des influenceurs TV pour connaître la proportion des relais d’opinion les plus puissants (comptes officiels, comptes stars, blogueurs…).
QUELLE MONETISATION DE LA SOCIAL TV ?
Certains dispositifs publicitaires permettent de valoriser des « packages » sociaux (aires sponsorisées, dispositifs multi-écrans, tweets sponsorisés…). Mais on ne constate pas d’augmentation linéaire des tarifs publicitaires télé. La fidélité, la qualité d’engagement du public ne se monétise pas directement. Et encore, le volume de chiffre d’affaire additionnel reste-t-il faible. Eric Scherer rappelle que 97% de la manne publicitaire reste sur le 1er écran de la TV
En revanche, cette socialisation n’est pas sans valeur puisqu’elle contribue en partie à l’audience, elle fidélise un noyau dur affinitaire qui sera exploité davantage demain grâce au ciblage de plus en plus précis des outils sociaux, notamment. Enfin, elle consolide l’audience télévisuelle elle-même. Sans l’interaction du public, où en serait l’audience des émissions de télé-crochet ou de télé-réalité ?
Cyrille Frank
Sur Twitter
Sur Facebook
Sur Linkedin
A lire aussi :
Très bon article. Merci.
Une petite digression pour remarquer que le complément social à la TV pourrait finalement aussi envahir d’autres secteurs événementiels non ?
Lors des dernières conf. auxquelles j’ai assisté, j’ai été surpris du bruit « silencieux » sur Twitter dans la salle pendant qu’un orateur parle. On commente, complète, critique ce qui se dit. Parfois même, l’orateur débriefe les tweets. On pourrait assez bien enrichir et étendre ce dispositif spontané en adoptant des principes de la TV sociale (?).
Voici un exemple de ce dont je parle : http://www.youtube.com/watch?v=EkluES9Rvak.
Lors de cette conférence (plutôt technique), l’oratrice propose des quizzes grâce à Twitter.
Merci Benjamin !
Je comprends mieux 🙂
Oui, c’est une excellente idée en effet, cela permettrait de capter une audience de plus en plus dispersée et volatile.
L’idée est de fournir une expérience immersive et surtout interactive. Déjà de nombreux conférenciers intègrent les questions par tweets, pour ceux qui sont un peu timides ou tout simplement absents physiquement.
Il y a là un grand chantier de travail et pourquoi pas des systèmes semi-automatiques à déclencher en wifi (ex : après autorisation, une video, un jeu, une page se charge sur le second écran de l’assistance).
On peut même imaginer demain du spectacle interactif (cf. les votes du public de Robert Hossein), et pourquoi pas certains films aussi. Et le livre dont vous êtes le héros alors !!! Ils ont annoncé qu’ils allaient le relancer sous forme de jeu d’ailleurs… http://lafeuille.blog.lemonde.fr/2011/01/12/le-renouveau-des-livres-dont-vous-etes-le-heros/
A creuser 😉
Toujours pertinents tes commentaires, merci !