Qui n’ a vu une présentation de Steve Jobs rate quelque chose… Cet indiscutable visionnaire et businessman, a aussi un grand talent : vendre ses idées. Il y parvient car il fournit un joli emballage. Divertissement (fun), émotions (feelings) au service du propos (fond).
La vidéo ci-dessus- beaucoup trop longue pour les gens « normaux » qui ont un métier, eux- mérite d’être regardée et disséquée, car elle résume bien les bonnes pratiques éditoriales.
A l’heure où les spécialistes de la communication glosent à n’en plus finir sur le story-telling, Steve Jobs nous montre à travers un simple discours comment cela fonctionne, simplement. Le discours du patron d’Apple aux frais diplômés de Stanford, moment généralement pénible, est un exemple du genre.
1/ DU CONCRET, DE LA SIMPLICITE
C’est la force de la narration, elle s’appuie sur des faits, pas sur des concepts. Un exemple vaut mieux bien des explications pour nos esprits étroits. Ce qu’a très bien compris Steve Jobs, c’est qu’il faut mettre l’exemple avant. Cela permet de captiver l’attention du public jusqu’au dénouement final : le conseil, la leçon ou simplement l’épilogue, si l’on est dans de la fiction pure.
2/ DE L’EMOTION COCO
Steve s’appuie très fortement sur l’émotion pour capter l’attention de son auditoire. Il raconte des faits personnels, gages de sincérité et facteurs d’identification. Lorsque l’on parle de soi, il y a fort à parier que l’on touche les autres, car on est tous faits de la même eau (d’autres diraient que l’on est tous plus ou moins déterminés socialement par les mêmes causes). C’est principalement ce qui explique le succès des grandes missions de déballage de soi, de Mireille Dumas à Jean-Luc Delarue…
3/ DU DIVERTISSEMENT, DU FUN, DU PLAISIR
Laurence, commentant mon dernier billet, me reprochait d’avoir pris un très mauvais exemple avec Apple pour évoquer la capacité de la marque à simplifier : »La comparaison avec le packaging mac est particulièrement raté : L’apparente simplicité du design est le produit d’un raisonnement très pointu ».
Mon propos était de dire combien les interface simples conçues par Apple (indépendamment du travail incroyable qu’ils ont nécessité) ont permis de servir le fond : des usages en l’occurrence. Le discours ci-dessus, illustre mieux que tous les discours, cette même philosophie. Il est rempli de petites blagues et de clins d’oeil (connotations porteuses de complicité) qui rendent le fond digeste et agréable à suivre. C’est ce que j’appelle l’emballage, c’est l’effort de vulgarisation ou de pédagogie sur le ton qui ne réduit en rien la qualité du discours.
Ainsi Jobs qui commence son discours par un peu d’auto-dérision réussit à désamorcer d’emblée le caractère roboratif de l’exercice. « je ne suis pas diplômé et je n’ai jamais été aussi prêt du diplôme de l’enseignement supérieur ».
Idem lorsqu’il se égratigne Microsoft sur le fait que l’interface typographique soignée du Mac a pu aussi se généraliser dans le monde PC, car elle a été copiée par Microsoft. Autant de petites relances sympathiques du discours qui ajoutent du fun, du plaisir en français.
4/ DU FOND
Mais ce discours est surtout réussi parce qu‘il sert un propos, parce qu’il dit des choses qui sonnent justes et qui sont illustrées par des exemples forts, à commencer par la vie, le parcours de son émissaire.
Jobs ne dispense rien que des conseils classiques, pour ne pas dire un peu gnan-gnan : « croyez en vous, écoutez votre passion, allez à l’essentiel, ne renoncez pas, n’ayez pas peur… (non il n’est pas subventionné par Jean-Paul II)
L’alchimie entre la forme et le fond lui donne cependant toute sa valeur : on écoute, on s’amuse, on est ému, on est convaincu.
C’est la leçon que je retiendrai de ce discours – n’étant pas diplômé de Stanbford – et qui illustre la philosophe de la pomme à l’ oeuvre dans la plupart de ses produits.
Cyrille Frank aka Cyceron
PS : merci @JulienJacob et @freddymini pour le lien du discours 🙂