La « bonne » culture n’existe pas

La « bonne » culture, confisquée par les élites, valorise une norme classique issue de l’institution scolaire. C’est un outil de domination symbolique, mais aussi socio-économique.

8 novembre 2012. En 2010 j’ai donné une formation à des étudiants en journalisme à qui j’ai demandé de choisir et hiérarchiser cinq sujets sur dix dans une composition virtuelle de Une. Je leur demandais ensuite de m’expliquer quelle était leur cible visée et leur ligne éditoriale.

La majorité a fait un choix élitiste, intellectuel, sérieux assez proche du Monde : sujets internationaux, politique, économie et société France. Pas de fait divers, pas de people. Seule une étudiante sur les 6 volontaires a présenté un sujet sport. Un étudiant, a présenté deux résultats : le premier choix baptisé “ligne éditoriale normale” et le second ligne édito “trash”.

Le jeune garçon – très intéressé et intéressant – voulait me montrer qu’il avait bien compris et décodé “la valeur” intrinsèque de chaque article et qu’il pouvait les hiérarchiser. Mais lorsque je lui ai demandé ce qui justifiait selon lui qu’une information était meilleure qu’une autre, il s’est trouvé en difficulté. Il s’est accordé rapidement sur le côté subjectif de son choix : la hiérarchie qu’il proposait correspondait à ses goûts personnels en matière d’information.

Quant à l’ensemble de la classe de 25 élèves, que je sondais, aucun n’achetait « Voici » et quand certains le lisaient parfois, c’était « uniquement chez le coiffeur ». En désamorçant un peu l’opprobre attachée à la lecture du titre de presse, avouant être moi-même un lecteur occasionnel, les mains ont fini par se lever, révélant une statistique plus conforme aux usages observés dans les études lecteurs.

Il est apparu clair que pour les jeunes étudiants, le divertissement, le fait divers, le sport étaient des sujets peu valorisants socialement qu’il convenait de minorer si ce n’est cacher comme des choses un peu “honteuses”. D’où l’idée de ce billet pour comprendre l’origine de cette hiérarchie culturelle tacite qu’on observe dans l’ensemble de notre société.

LA “VRAIE” CULTURE EST FORCÉMENT INTELLIGENTE

Il n’y aurait de culture que dans l’élaboration du sens, le royaume des idées. Vision très platonicienne qui imprègne encore aujourd’hui notre conception de la connaissance. Se cultiver revient à acquérir des connaissances classiques supposées meilleures car  permettant l’accès à une compréhension supérieure des choses.

Les concepts développés par les humanistes du 18e s, les philosophes gréco-romains et l’ensemble des penseurs canonisés par l’institution seraient ainsi les meilleurs moyens de former l’esprit. C’est la fameuse construction de “l’honnête homme” du 17e s.

Une hiérarchie qui s’appuie sur la réplication des valeurs enseignées aux classes les plus favorisées qui ont appris le latin-grec, la chronologie historique des rois de France, les départements et fleuves français.

Bref, l‘éducation à l’ancienne, riche de faits et de données qui serviront de critère sélectif aux futurs concours de culture générale des grandes écoles. De là, la supériorité intériorisée de l’essai philosophique sur le roman, du roman sur la bande-dessinée… Sur fond de culture judéo-chrétienne de l’effort.

Si ce n’est pas dur à lire, alors cela doit avoir moins de valeur. Il faut souffrir pour être belle – beau, il faut lutter pour être intelligent. D’où la propension de certains auteurs ou philosophes à s’entourer d’un vocable opaque et complexe, censé être le gage de leur profondeur de pensée et qui masque quelquefois la faiblesse de leurs concepts.

UN INSTRUMENT DE DOMINATION

Comme la bien montré Pierre Bourdieu dans la “reproduction”, la suprématie accordée à la culture “savante” ou classique, sert d’instrument de domination des classes supérieures. Celles-ci sont bien mieux préparées pour leur assimilation, car elles bénéficient du capital culturel de leurs parents, de l’aide et soutien de leur environnement éduqué, des meilleures écoles et professeurs…

Le plus ironique, est que cette supériorité de la culture classique est acceptée tacitement et inconsciemment par les dominés. Aussi, les classes plus modestes s’infligent-ils une forme de “violence symbolique” (selon les termes de Bourdieu) sans s’en rendre compte.

Ainsi courent-elles après cette culture qui leur a échappé dans leur enfance, notamment à travers les livres de culture générale pour les nuls, les romans historiques (qui se multiplient dans les rayons), les revues de vulgarisation (Historia, Science & Avenir), les jeux de culture générale (Question pour un Champion) et autre “outils de rattrapage”…

C’est le même mécanisme à l’oeuvre qu’à l’époque féodale avec la constitution des trois ordres dont deux dominaient le 3e, lequel pourtant se soumettait volontiers, car sous l’emprise culturelle et psychologique des curés (“les voies du Seigneur sont impénétrables”) et des clercs. A l’origine une solidarité équitable sur la papier et profondément déséquilibrée en réalité :

  • Les nobles : guerriers protecteurs de l’intégrité physique de tous
  •  Les religieux : protecteurs de l’âme et garants du salut dans l’autre monde
  • Les paysans : laborieux assurant la subsistance alimentaire des autres (en réalité les esclaves)

Aujourd’hui, l’échelle des valeurs culturelles est acceptée et validée par les différentes classes, car elle permet à chacune de se positionner.

C’est la fonction statutaire de la culture. La hiérarchie des normes est acceptée car elle permet surtout ne pas être “eux”, la classe d’en dessous, celle qui rigole en écoutant Bigard et va aux concerts de Johnny. Côté classes populaires, elles permet de se rassembler par opposition à la culture “intello coincée” qu’elle rejettent, tout en reconnaissant implicitement sa supériorité (“c’est trop intelligent pour moi”).

SIGNES EXTÉRIEURS DE RESPECTABILITÉ CULTURELLE

Toutefois, les classes moyennes supérieures trichent un peu avec cette culture “classique”. Elles cèdent de plus en plus volontiers aux produits de la culture populaire qui savent s’entourer d’un voile de respectabilité.

C’est exactement la même stratégie que celle du magazine Newlook dans les années 80. Ce dernier a étendu la cible étriquée des amateurs de porno, en décomplexant l’achat “cul” grâce à l’alibi du fameux “reportages sur les requins”.

La télévision regorge d’exemples du même ordre : Mireille Dumas (Bas les masques) ou Jean-Luc Delarue (Jour après jour) , ce n’est pas du voyeurisme, c’est de la curiosité psychologique. Envoyé spécial ou Zone interdite diffusant un nième reportage sur la jet-set dorée ou au contraire sur la misère la plus infâme des bordels de Bangkok, ce n’est pas du racolage, c’est du magazine d’information.

Le succès de Koh Lantah, n’a rien à voir avec le désir malsain de voir des gens s’entre-déchirer après avoir été poussés à bout par des conditions de vie misérables. C’est une expérience enrichissante de “dépassement de soi”. Et une émission pédagogique qui apprend à se débrouiller dans des conditions hostiles.

Le grand journal de Canal+ n’est pas un show outrageusement flagorneur vis à vis de ses invités. C’est une émission montrant des artistes et des intellectuels de qualité présentés par de jeunes gens beaux, drôles et intelligents.

Canal+, c’est bien, TF1, c’est mal. La lecture est noble, la télévision c’est le diable… etc. Derrière chacun de ces jugements de goût, le téléspectateur obéit inconsciemment à une échelle normative dont les référents sont tirés de la culture classique ou « savante », elle-même issue de l’institution scolaire dominée par les classes sociales favorisées.

Dirty Harry

LE BRACONNAGE DES ELITES DANS LA CULTURE POPULAIRE

On assiste par ailleurs depuis quelques années à l’emprunt de références à la culture populaire par les élites qui s’en servent comme outils de différentiation au sein de leur milieu homogène. Ils sont encouragés pour ce faire par des magazines « intellectualisants », de type Les cahiers du cinéma ou Les Inrockuptibles, qui respectabilisent la culture populaire. Voir paragraphe ci-dessous.

Ainsi des “nanars” autrefois déconsidérés comme Dirty Harry ou Rambo reviennent désormais dans les conversations mondaines parés d’un nouvel éclairage intelligent. Il est vrai que le second ne dit pas autre chose que le très admiré Voyage au bout de l’enfer de Michael Cimino.

Le film est emballé dans une dose d’action, un peu grossière, son propos moins subtil, plus verbeux… Mais il raconte la même chose : cette double peine des soldats du Vietnam, ayant vécu l’enfer de la guerre et retournant vers l’enfer du rejet social. Jusque dans les années 90, la référence à Rocky ou Rambo dans les classes supérieures vous valait excommunication et déconsidération immédiate…

On peut presque considérer que les classes populaires, non seulement dominés inconsciemment par les normes de la culture classique, se font en plus déposséder de leur terroir culturel original : c’est la double violence symbolique. (PS Merci à Valérie avec qui j’ai discuté de ce sujet et à qui je dois donc ce paragraphe)

LÉGITIMATION PAR L’INSTITUTION

La bonne culture, tout comme le bon goût en matière artistique, est validée par l’institution : les musées, les radios culturelles, les galeries d’art. Une fois le tampon de respectabilité des décideurs de la norme appliquée sur une oeuvre, celle-ci peut ensuite se répandre dans les classes aisées. Et bénéficier en retour d’une popularité au sein de la classe moyenne.

Ainsi, la norme culturelle est évolutive. Le jazz ou même la musique classique telle que « la flûte enchantée » de Mozart n’ont pas été considérés à l’origine comme de la culture noble, digne des élites de leur époque. S’agissant du jazz, c’est France culture dans les années 60 qui a popularisé et validé cette pratique autrefois assimilée au divertissement populaire (Leonard 1962).

En matière artistique, c’est l’accrochage des Van Gogh chez les galeristes d’abord, puis dans les musées qui leur ont conféré le droit de s’appeler oeuvres d’art et d’être considérées comme de la culture « classique ».

Idem aujourd’hui des artistes contemporains, de Soulage à Basquiat en passant par Klein ou Raynaud… C’est l’institution qui, selon ses propres critères, décide de distinguer l’artiste du dimanche, de l’artiste tout court.

C’est aussi elle qui hiérarchise les artistes, classant Maurice Denis derrière Gauguin par exemple. Un rôle partagé et disputé ensuite au marché de l’art porté en premier lieu par les riches collectionneurs privés dont la hiérarchie financière échappe au commun et parfois à tout critère proprement artistique.

C’est le phénomène d’emballement social (« il me le faut ») d’une classe d’hyper-riches qui fait grimper la cote d’un artiste plutôt qu’un autre. De là l’envolée des prix ahurissante de certains artistes (ex : Jeff Koons ou Murakami). D’où la domination en la matière des artistes américains à partir de la libération, reflet d’une domination économique et financière. D’où la domination chinoise du marché de l’art international depuis 10 ans.

TOUT EST CULTURE, MAIS TOUT NE SE VAUT PAS

La culture est l’ensemble des connaissances, des savoir-faire, des traditions, des coutumes, propres à un groupe humain, à une civilisation. Tout est donc potentiellement culture, depuis La roue de la fortune jusqu’au reportage historique racontant la découverte des “manuscrits de la mer morte” sur Arte. Tout potentiellement peut-être matière à réflexion et à intelligence, y compris Secret Story ou Le loft (riches d’enseignements sociologiques, notamment).

C’est ce que nous prouve un certain Quentin Tarantino, qui grâce à son regard décalé, amusé et nostalgique, recrée de l’intelligence et du sens à partir de références tirées de sa culture populaire éclectique (série Z, mangas, nanars d’action…). Culture, mâtinée, il est vrai, de culture cinéphile et musicale savante.

C’est aussi ce que nous montrent Picasso, Picabia, Ernst et autres artistes génialement inventifs qui, à partir de rebuts divers (chutes de bois, morceaux de féraille, pneus, boulons…) recréent de la beauté et du sens.

Le divertissement est culture, les sitcoms débiles sont culture : ils sont des expériences émotionnelles, sociales non neutres qui constituent notre expérience et contribuent à façonner notre personnalité et notre imaginaire. (Voir l’étude sur la réception du feuilleton Dallas par Liebes et Katz, 1990).

Pourtant, toutes les oeuvres culturelles ne se valent pas. Le Big deal de Lagaf’ n’est pas du même niveau que La République de Platon. Et prétendre qu’ils ne sont pas comparables n’élude pas la question de leur valeur culturelle intrinsèque.

Pas de relativisme culturel facile qui dédouane de toute réflexion et prise de position. Alors quels critères adopter ? Voici quelques suggestions :

  • La richesse signifiante (stimulation de l’imaginaire, niveau d’informations, cadre de réflexion…un jugement très subjectif)
  • L’originalité par opposition à la standardisation (un scénario nouveau par rapport aux mécanismes industriels des séries hollywoodiennes)
  • La sincérité (très importante dans le domaine artistique en particulier, comme l’explique brillamment cet article)
  • L’émotion véhiculée (là encore très subjectif, dangereux dans le domaine de l’information)
  • L’évocation, le rêve, l’imaginaire, l’absurde… oui, une ouverte peut être féconde et absolument inutile, dénuée de sens. Oscar Wilde dirait même que c’en est même la condition ^^

Esprit critique et subjectivité créative. Il y a en effet dans l’évaluation de la richesse culturelle un facteur projectif. La richesse d’une oeuvre dépend de son propre bagage initial d’interprétation (le capital culturel ou grille de lecture préalable). Mais aussi de ce que l’on y met soi-même, de ce que l’oeuvre évoque pour nous par rapport à la projection subjective de nos sentiments, de nos souvenirs, de nos émotions…

C’est pourquoi nous sommes parfois surpris de l’interprétation très savante des critiques d’art qui voient en des oeuvres une richesse de significations incroyable, quelquefois loin de l’ambition initiale de leur créateur. Mais après tout pourquoi pas ? Le pouvoir d’évocation n’est-il pas déjà, en soi, une réussite ?

Une démarche poussée à l’extrême par David Lynch dans Mulholland Drive, film conçu comme une tâche de Rorschach, où chacun est invité à projeter ses fantasmes, ses propres interprétations. Un cinéma avant-gardiste qui empiète sur l’art contemporain, comme expérience à la fois intellectuelle et sensorielle, mais qui est pour le coup inaccessible au spectateur moyen, non averti (au sens propre comme au figuré).

UNE MARCHANDISATION DE LA CULTURE

En plus de la norme qualitative décidée par les élites sociales, s’ajoute la contrainte quantitative. Notre société de consommation nous pousse à considérer la culture comme un objet de consommation.

Et l’évaluation du niveau culturel d’un individu tend à se mesurer sur le plan quantitatif : combien d’expositions a-t-on vues, combien de livres a-t-on-lus ?

La culture générale s’évalue au nombre de données régurgitées, une vision comptable encouragée par les jeux télévisés telle : Question pour un champion.

La pression sociale est forte pour mesurer cette capacité et jauger le niveau de son interlocuteur, à la fois pour vérifier qu’il est digne de soi et pour se positionner soi-même, afin de se rassurer et se conforter statutairement.

Il suffit de voir les yeux écarquillés des élites quand vous osez confesser ne pas connaître une donnée élémentaire de leur panoplie sociale. “Comment toi, à qui j’ai accordé ma confiance et mon attention, tu ne sais pas cela » ? Avec cette inquiétude qui point en arrière-plan : “est-il digne de mon estime ?”. Sans mésestimer non plus la vanité de celui qui s’appuie ainsi sur la tête de son interlocuteur, pour se hisser symboliquement au-dessus de lui.

En réalité la culture ne porte pas tant sur les objets de l’attention que sur la démarche. “Il n’y a pas d’hommes cultivés, il n’y a que des hommes qui se cultivent” disait le maréchal Foch. Toute émission de télévision, aussi débile soit-elle, peut être riche de sens, d’imaginaire, d’humour. Tout dépend de la grille de lecture et de la distance prise.

Pour ne citer qu’un exemple, la publicité dénoncée comme moyen de manipulation supposé des foules par le “lavage de cerveau” de la répétition est aussi un formidable observatoire de notre société.

C’est une poste d’étude des tendances sociologiques très riche pour qui s’amuse à décoder les stratégies publicitaires derrières les clips anodins, comme cette analyse de la campagne Orangina :

Evolution de la campagne “Chabat” des bouteilles humaines mises à rude épreuve vers celle des animaux humanisés avec le slogan “naturellement pulpeuse”. On sent clairement la prise en compte de la tendance environnementale et du retour à l’authenticité. La pulpe devenant la preuve matérielle de la “naturalité” du produit sur laquelle on insiste et que l’on replace dans un environnement ad hoc : le monde animal.

On ajoute à cela le territoire de marque décalé et humoristique qui joue sur la fonction métalinguistique (le discours sur le discours). Ainsi, ces personnages qui tournent en dérision les codes publicitaires traditionnels “grâce à Orangina, mes cheveux sont plus brillants” pour créer une complicité tacite avec le jeune public critique vis à vis de ces modes de communication “poussiéreux”.

La publicité exploite ainsi le rituel d’affranchissement générationnel et le désir inconscient d’autonomisation de l’adolescent par le rejet des normes parentales.

Voilà comment ce clip publicitaire, élément « inférieur » de la culture populaire, nous enseigne des choses intéressantes sur les valeurs de notre société, sur ses normes et rituels sociaux.

Ceci, via à une grille d’interprétation et un capital culturel préalable (connaissances, valeurs, expérience…). Laquelle prouve en soi qu’il existe bien un cadre culturel supérieur aux autres : celui qui donne les instruments de la réflexion ré-exploitables ailleurs. Mais un cadre utile de culture « savante » qui ne résume cependant pas l’intégralité de la culture « noble ».

La “bonne” culture n’existe pas en soi, contrairement à ce que les élites veulent nous faire croire. Cette échelle normative est un instrument de domination fondé sur un domaine où elles disposent d’un avantage comparatif grâce à l’institution scolaire. Cette norme est aussi créée par les autres institutions culturelles : radios, musées, galeries sur des critères subjectifs et parfois arbitraires.

Mais tout ne se vaut pas non plus, et le capital culturel “savant” sert aussi à prendre un recul salutaire et à s’enrichir de tout. Si supériorité d’un objet culturel il y a, elle ne peut provenir que dans son degré de « structuration mentale », sa capacité à libérer – voire organiser – la pensée, l’imaginaire, l’émotion en amont.

Une grille de lecture, une stimulation sensible, une capacité d’analyse, qui favoriseront l’ouverture d’esprit vis à vis des autres formes de la culture, à la société, aux autres. Indépendamment des jeux de positionnement sociaux et des mécanismes de suivisme rituels. Mais un jugement qui reste fondamentalement subjectif, d’où la tolérance nécessaire face au jugement de goût*.

Tout est potentiellement, culture. A condition d’être accompagné, guidé vers du sens, de la critique, de la créativité… Une fois de plus, l’éducation, le travail d’explication profite surtout aux classes supérieures.

Mais entre l’inaccessibilité d’un texte kantien originel et une blague de Coluche sur Kant, il y a pleins de nuances. Et je crois que la solution éducative est dans ce gris là. Evolutif, interactif. En tout cas non DOGMATIQUE.

* Lire Kant, « critique de la faculté de juger » et la propension des hommes à préjuger de l’universalité de leur jugement de goût, contrairement au domaine alimentaire.

Cyrille Frank

Directeur de la formation @CosaVostra

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Crédits photos en CC via Flickr.com ©vintageit, theanswerisnotinthetv, maisonbisson

43 commentaires sur « La « bonne » culture n’existe pas »

  1. Bonjour Cyceron,
    Joli papier, bien troussé et parfaitement illustré.
    Juste une réaction à fleur de peau (et puis, parce que polémiquer, c’est n’être pas insensible) : issue d’une « classe sociale défavorisée », j’ai cependant lu (et apprécié) Platon et Maupassant, mon prof de dessin m’a appris et fait aimer Picasso. Mes parents ouvriers m’ont emmenée au Louvre et dans la plupart des musées que l’envie plaçait sur leur chemin. Ils étaient, chacun selon sa sensibilité, très cultivés.
    Et si on parlait du plaisir de la culture?

    1. Bonjour Claudine,

      Merci du compliment d’abord,
      Ce blog est un lieu de discussion et de confrontation de points de vue, je suis heureux d’y voir des réactions, polémiques ou pas 🙂

      Je pense que vos parents sont des gens exceptionnels, car les statistiques de fréquentation de musées par les familles ouvrières sont très faibles. 🙂 Heureusement qu’il n’y a pas de déterminisme social ! J’en suis moi-même un exemple dans une certaine mesure.

      Mon propos n’est pas de dire que Platon, Picasso et les oeuvres classiques sont à mettre au rebut, bien au contraire. Il est plutôt de dire que la culture « populaire » n’est pas sale ni nécessairement « inférieure ».

      C’est plutôt contre une attitude de mépris social des classes moyennes-supérieures que je m’érige. Pas contre la culture « savante ».

  2. Ce que j’aime bien avec cet article c’est que je suis d’accord et pas d’accord avec toi. Sans doute est-ce parce qu’il est difficile de pauser des mots simples sur la complexité ? Pour ma part j’ai du mal à envisager que le refoulement social puisse m’interdire la masturbation intellectuelle 😀 😀

  3. Superbe article (et merci pour la dédicace) ; j’attends l’essai avec impatience… je crois que je vais te harceler comme j’ai harcelé l’Autre (cf hier), pour que tu récidives et sois en bonne place dans les librairies huppées/agitateurs d’idée et, bien sûr, le nanan des écrivains (ils refusent de l’admettre mais oui) : la tête de gondole en supermarchés !

    1. Merci à toi pour ce commentaire !

      Moi, c’est surtout une question de temps et de priorités, je dois reconstruire mon poste en tant qu’indépendant avant de pouvoir « perdre du temps » sur des projets d’écriture non rentables…

      Et je n’ai rien contre les têtes de gondole, je n’ai aucune prétention littéraire et mon égo dilaté trouve des vecteurs d’expression ailleurs 😉

      A très bientôt IRL-ORL

      Cyrille

  4. D’un certain sens tu as raison, la culture « intelligente » est un instrument de domination.
    Mais d’un autre côté, la culture « bête » l’est aussi. Qui a intérêt à ce que les foules achètent les magazines people et ne réfléchisse pas?

    Bref, aussi intéressante que soit ta démonstration, je ne vois pas pourquoi il faudrait renoncer à une « culture élitaire pour tous », comme disait l’autre…

    tout en sachant que chacun peut se permettre des mélanges, un peu de braconnage dans la culture populaire!

    1. Bonjour Eric,

      Je ne milite absolument pas pour la disparition de la culture « classique » ou savante ! C’est bien pour cela que je précise que tout ne se vaut pas et que Platon reste plus riche et intéressant que le Big Deal de Lagaf’.

      Mon propos est un appel à l’ouverture intellectuelle vers la curiosité en général qui englobe tous types d’objets culturels (y compris de la culture considérée comme inférieure) et vers davantage de tolérance vis à vis de ce qui n’est pas soi.

      Il m’a semblé intéressant aussi de montrer que cette « bonne culture »était souvent une construction sociale arbitraire et vide de sens, destinée à maintenir une distance de classe, voire une domination symbolique. Ainsi du rejet de la télévision en général comme outil inférieur au livre, distinction qui n’a pas de sens pour moi.

      C’est la dénonciation de la vacuité des apparences sociales et non pas le rejet de tel ou tel type de pratique culturelle.

  5. Vous avez raison de mettre en avant ce qui fait sens, plutôt que la qualité opérationnelle de la culture dans un salon.

    La culture instrument de domination est en revanche un joli conte de Bourdieu, qui cache un autre mépris qui est le mépris inverse que celui qui est décrit, celui des classes dites populaires vis à vis des élites. Cela ne fonctionne que si intellectuellement ou dans la vie pratique on adhère à l’existence du mécanisme de classes. Ce qui n’est plus vraiment le cas, tellement aujourd’hui les parcours sociaux et culturels sont complexes.

    De plus, l’appréhension et la constitution de soi par la culture et par la culture des autres a été magnifiquement démontrée par une personne bien antérieure à Bourdieu, et avec beaucoup plus de considération pour la personne humaine, bah c’est l’introduction de la recherche par Marcel Proust : Combray.

    Bref, Proust éternel, Bourdieu déjà dépassé. L’un fait sens pour l’homme l’autre est réduit à des considérations d’époque et ne résiste pas aux mutations de société.
    Mais là ce n’est plus vraiment une question de culture qui est à l’oeuvre, mais de richesse d’information.

    1. Bonjour Thierry,

      Merci pour votre commentaire critique sur le fond 🙂

      Oui je crois encore aux classes, même si, comme vous le dites les frontières sont beaucoup plus floues, s’agissant notamment de la classe moyenne. Le critère distinctif est celui du niveau d’étude et du capital économique de base (héritage).

      Il existe toujours des catégories sociales supérieures ultra-instruites, de niveau de revenus élevés vivants au coeur des grandes agglomérations. C’est le profil de ceux que l’on retrouve dans les grandes écoles aujourd’hui.

      D’autres, de niveaux de revenus bien inférieur, sans capital économique de base, de niveau d’instruction supérieur mais plutôt universitaire ou cycles secondaires courts, que l’on retrouve dans les emplois de cadres moyens, employés au dans l’administration.

      Enfin une classe populaire vivant avec le smic ou légèrement au dessus, de niveau d’instruction inférieur au bac, composés d’employés de faible qualification, exerçant des métiers manuels (ouvriers, manutentionnaires), de la vente ou petits emplois précaires. Ce sont les plus touchés par la crise naturellement.

      Même si la dé-syndicalisation, la disparition progressive du nombre d’ouvriers ne permet plus de définir cette classe de façon homogène et soudée, il reste des clivages très nets entre les populations sur les critères d’instruction principalement. Vous pouvez trouver le terme de « classe » vétuste et poussiéreux, mais les grandes familles sociales existent toujours.

      Je n’ai pas compris votre rapprochement avec Proust ni du Bellay… vous pouvez m’expliquer ?

  6. Ah, désolé, j’ai cité Proust, mais l’information était déjà là, en quelques lignes… et ca doit dater d’un billet poétique de blog du XVIème siècle :

    Heureux qui, comme Ulysse, a fait un beau voyage,
    Ou comme cestuy-là qui conquit la toison,
    Et puis est retourné, plein d’usage et raison,
    Vivre entre ses parents le reste de son âge !

    Quand reverrai-je, hélas, de mon petit village
    Fumer la cheminée, et en quelle saison
    Reverrai-je le clos de ma pauvre maison,
    Qui m’est une province, et beaucoup davantage ?

    Plus me plaît le séjour qu’ont bâti mes aïeux,
    Que des palais Romains le front audacieux,
    Plus que le marbre dur me plaît l’ardoise fine :

    Plus mon Loir gaulois, que le Tibre latin,
    Plus mon petit Liré, que le mont Palatin,
    Et plus que l’air marin la doulceur angevine.

    Je pense que tout est dit en quelque ligne vers la fin…

  7. Le texte est bien écrit, mais m’apparait quelque peu naïf. D’abord, parce qu’il n’est pas un seul exemple que l’auteur donne et qui ne relève pas du marché: industrie cinématographique et télévisuelle. Ensuite, parce qu’il entretient le clivage « culture savante »/ culture populaire », alors que la cultre savante puise trés ouvent ses sources (et avant le nanar!!! ) dans la culture populaire, cf Molière et la commedia dell’arte, Bartok et la musique populaire hongroise.
    Mais le pire, c’est que l’auteur ne considère l’auteur que comme consommateur de « produits culturels », qu’il soient « grand public », « de masse » ou de niches. Or, défendre la culture populaire, c’est aussi défendre le peuple comme force de création, auquel on doit pas mal de renouvellement des formes du jazz au hip hop et de la BD au roman noir!
    Enfin, confusion des genres entre une daube qui n’a pour vocation que de vendre du temps de cerveau disponible, type Koh Lanta, et une intention artistique chez un auteur, de Cimino à Lynch.
    Enfin, ne faisons pas une interprétation anachronique de Bourdieu anachronique: pour étudier la force de légitimation de la culture classique, il n’a jamais estimé pour autant que le peuple devait en être privé! Il engueule les jeunes de banlieue dans le film de Pierre Carles en leur disant « l’antintellectualisme, c’est ce qui fait perdre la classe ouvrière depuis des siècles! »

    rappelons enfin que Hugo, Shakespeare, Molière ont été de leur temps des auteurs populaires. Au nom de quoi devrait -on laisser ce patrimoine à la bourgeoisie?

  8. Bonjour Valdo,

    Il y a sans doute dans mon texte une ambiguïté que je vais lever.
    Mon message n’est absolument pas de rejeter la culture « savante » et surtout pas d’inciter les classes plus modeste à s’en priver !

    En revanche je conteste le monopole que cherchent à instaurer les élites à partir de ces seules sources-là.

    La culture savante/populaire est effectivement un jugement normatif qui évolue dans le temps. J’avais un paragraphe entier qui y était consacré et que j’ai supprimé pour ne pas partir dans trop de directions. En effet, la culture aujourd’hui considérée comme noble ou savante était la « sous-culture » d’hier, que l’on parle du jazz, de la variété française de Brel à Brassens ou même si l’on remonte plus loin dans le temps, la musique classique profane par rapport à la musique religieuse… Ou pour reprendre vos exemples judicieux Molière (que j’avais retenu aussi), Shakespeare ou Hugo…

    Mon propos se réduisait effectivement à la perception de la culture, pas à sa création qui est un autre sujet. Ce qui ne veut pas dire que je réduise les masses à des consommateurs « passifs ». La production culturelle et les mécanismes de réappropriation des objets culturelles est un autre thème intéressant. Mais vous avez raison de le mentionner.

    En revanche je revendique cette « confusion » comme vous dites, cet éclectisme de curiosité, d’ouverture et de compréhension du monde. Je ne souhaite pas réduire la seule culture à la norme scolaire imposée par les élites, je réfute aussi le rejet systématique de ce ce qui est censé être « mauvais » pour l’Homme, y compris les émissions de tv que vous considérez avec le plus grand mépris.

    Une fois encore je le répète, c’est moins l’objet qui importe que les conditions de sa réception : recul, analyse, humour… je crois au contraire que dans ces conditions d’observation, cette sous-culture peut s’avérer riche.

    Enfin il y a quelque chose qui me dérange avec cette critique de la culture de masse comme manière de vendre du « temps de cerveau disponible », c’est qu’elle est très fortement teintées d’idéologie marxiste sur les effets puissants des médias (Marcuse, Adorno) qui sont très largement fausses, car elles surestiment beaucoup le pouvoir des médias sur les esprits, comme en attestent de nombreuses études sur la réception critique y compris dans les classes moins instruites.

    Enfin ces théories débouchent généralement sur la nécessité du contrôle culturel « utile », avec toutes les dérives autocratiques que cela suppose, que l’on parle des dictatures soviétiques ou encore de l’Inquisition médiévale. « Faire le bonheur des gens » contre leur gré est quelque chose que je rejette comme un remède bien pire que le mal.

    Je préfère faire preuve de pédagogie que de coercition en matière culturelle. Et pas que…

    Cordialement

    Cyrille

  9. Bonjour,

    Peut-être y a t-il confusion entre plusieurs choses :

    – culture et pratique culturelle
    – culture et divertissement

    Pour le premier point, Bourdieu nous explique que les classes aisées pratiqueront plutôt le tennis (ou le golf) et les classes populaires plutôt le football. Ici, l’auteur de l’article a raison en disant qu’aucune de ces pratiques n’est supérieure à l’autre. Le prétendre ne serait que snobisme.

    Pour le second point, il me semble qu’il est important de distinguer culture et divertissement. Je vais avoir du mal à définir « culture » dans le sens où je vais l’employer, mais disons que cela peut rassembler tout ce qui me rendra plus intelligent, ce qui me donnera une meilleure compréhension de moi-même et du monde.
    Dans ce cas, on peut, et on doit, établir une hiérarchie.Stephen King ne vaut pas Marcel Proust, même si j’aime beaucoup King. Ce sont deux choses différentes (même s’il faut bien admettre que la frontière entre culture et divertissement est souvent difficile à établir.)

    Pour reprendre le début de l’article, lorsque les étudiants hiérarchisent l’information comme il le font, ce n’est pas seulement pour une question de positionnement social mais certainement parce qu’ils ont conscience que leur mission n’est pas d’abord de nous apprendre que Céline Dion a accouché de jumeaux ou que Saint-Etienne à fait match nul et qu’il y a certainement des choses plus importantes si on a l’ambition de faire de l’information.

    Je crois que les choses ont une valeur en soi, indépendamment du jeu social, des snobismes et des effets de mode.

    PS : dans les concours administratifs, la culture générale est de moins en moins un élément discriminant puisqu’on lui préfère aujourd’hui des épreuves de note de synthèse.

    1. Bonsoir Ignatius,

      Et bien justement c’est mon propos de montrer que ce distingo entre culture et divertissement n’est pas pertinent : tout est culture. Le divertissement est porteur de sens et d’intelligence aussi pour reprendre votre définition qui rejoint la mienne d’ailleurs.

      Oui, on peut et doit établir une hiérarchie, ce que je défends en disant que tout ne se vaut pas pour autant. Mais faire cette séparation essentielle au sens premier du terme, c’est précisément opérer un rétrécissement de la culture et de la connaissance au seul champs de la culture savante et scolaire.

      Ce qui non seulement n’est pas efficace en termes de compréhension du monde, mais opère aussi d’un certain mépris de classe inconscient. Il faut être poreux à la société dans laquelle on vit, pour mieux la comprendre et aussi mieux l’aimer. A établir des catégories culturelles infranchissables, on établit des barrières entre les gens, ce qui n’est pas propice à l’ouverture sociale, à la sympathie entre toutes les personnes, quel que soit leur niveau d’instruction, leurs goûts, leurs référents. C’est cela, le vrai fond de mon papier.

      Sur le dernier point que vous évoquez, cela revient au même 🙂 Les choses plus importantes par rapport à quoi ? La formation des bons esprits citoyens certainement. Mais on reste dans le registre de la « bonne culture » par rapport à une norme scolaire ou une idéologie bien précise.

      Le journalisme comme outil d’éducation des foules ? Oui, mais pas uniquement. C’est une réduction des missions du journaliste qui doit aussi rendre service, rapprocher les individus (et le people ou le sport servent aussi à cela) et faire plaisir que diable ! Ce n’est pas sale… Mais notre vielle culture judéo-chrétienne ne valorise pas ce plaisir pourtant essentielle à l’harmonie sociale.

      Pour les concours administratifs, peut-être, mais pas pour les grandes écoles croyez-moi. Et je m’en félicite, je trouve cela justifié, car la culture générale (et pas uniquement savante) accroît l’ouverture d’esprit, la souplesse de raisonnement, la malléabilité sociale…

      Merci de votre commentaire intéressant

      Cordialement

  10. C’est très intéressant, merci …. cela dit je pense que le schéma de la hiérarchie a énormément évolué depuis l’analyse de Bourdieu (la distinction = fin des 70s), sans même parler de Proust comme le fait l’un des commentateurs. A l’époque il y a avait un marché de la culture « noble » (ex, les disques de classique) et un système hiérarchique assez clair, qui épousait quand même souvent la valeur intrinsèque des oeuvres (Platon et Shakespeare plus intéressants que la BD, en général). A l’époque à la télé Pivot interviewait pendant 1h30 un écrivain comme Marcle Jouhandeau, en prime time ou presque – aujourd »hui Pujadas écoute 5 mn Houellebecq dire des conneries sur le plateau du 20h…

    Aujourd’hui cette hiérarchie n’existe plus ; il y a bien plus que le braconnage et le retournement snob des valeurs populaires type « moi aussi j’aime Johnny », il y a que la valeur de l’honnete homme et la culture classique qu’elle implique n’a plus court nulle part, sauf chez quelques profs de prépa. Soyons clair : la bourgeoisie n’a pas toujours été cultivée, mais elle savait son latin et respectait certaines normes. Aujourd’hui elle est inculte tout autant que les classes populaires, et se réfugie comme elle dans la culture « moyenne », celle qui est dictée par ce marché de l’art qui est très bien décrit ici. Bref tout le monde prétend aimer Madonna, même les snobs.

    Bien sûr il y aura toujours un phénomène de distinction par la culture, par le snobisme, mais cela porte sur des aspects plus « pointus » et moins nobles. Comment frimer avec Shakespeare, que tout le monde connait de nom et qui est quand même assez difficile à aborder ? Autant se la raconter avec Basquiat, ou les futurs nouveaux Basquiat depuis que ce dernier est devenu « mainstream » avec ses grosses expos. Parallèlement, le spectacle décomplexé de son inculture (« on s’en fout, on veut pas s’prendre la tete ») est de plus en plus fréquent, y compris voire surtout chez les elites.

    Enfin ces étudiants qui composent une « Une » façon le Monde s’amusent en classe, mais une fois qu’ils bosseront ils mettront des tartines de faits divers, de people et de sport, parce que ça se vend et parce que tout le monde en raffole, étites et pas élites. Et cette hiérarchie des sujets « nobles » ne recoupe pas d’ailleurs la hiérarchie de la culture nobles (Bach en haut, M Jackson en bas).

    PS : Cimino c’est « Voyage au bout de l’enfer », pas « retour vers l’enfer » (d’ailleurs le titre original n’a rien à voir)

    1. Guillermo,

      Merci de votre commentaire que je trouve très pertinent et qui vient fort justement tempérer mon propos.

      Vous avez tout à fait raison, et ce que vous décrivez est incontestable.
      En même temps, il reste ce vieux fond de différentiation sociale par la culture « savante », même si ce terreau s’est incontestablement appauvri.
      Pourquoi croyez-vous que s’arrachent les livres de vulgarisation sur la mythologie, l’Histoire, les arts, la culture générale ?

      La référence perdure, même si la capacité d’en parler se réduit. Et en même temps vous avez raison de noter qu’une partie de la classe supérieure devient inculte. Mais nous ne parlons sans doute pas des mêmes. Je fait référence davantage aux clercs qu’aux riches en général.

      Chez ces élites, la culture scolaire reste discriminante, sur fond d’éclectisme de bon aloi. C’est aussi l’emprise des théories marxistes sur les méfaits de la culture de masse comme outil de manipulation des foules (Marcuse, Adorno Ellul, Tchakothine…)

      Je conteste cette vision étriquée qui a aussi comme motivation plus obscure de défendre un territoire, une domination symbolique sur les fameux « incultes », les simples d’esprit qui seraient manipulés par la TV et la publicité.

      Les mécanismes décrits par Bourdieu me semblent toujours opérants, même si la notion de culture « savante » ou « classique » a évolué assurément
      Bien cordialement.

      Vous avez bien raison, je sais que le principe de réalité rattrapera ces étudiants, mais leur posture est intéressante, car elle révèle une norme sociale très ciblée.

      PS : merci pour la rectification ! Effectivement « Deer hunter », ça n’a rien à voir 🙂

      1. Et merci pour la réponse (c’est rare de prendre le temps de répondre à chacun !). Cela dit je pense que même les « clercs » ont disparu… sauf à l’école, où le vernis de « culture g » sert assez largement les objectifs de reproduction. Mais une fois la prépa passée, pour la majorité, c’est devant TF1. En mode ironique, bien sûr, hein, on n’est pas des glands. Mais à force…

        1. Je vous en prie, la discussion m’amuse plus que l’exposé 🙂

          C’est un point de vue intéressant, la « fin des clercs ». Vous avez une vision très pessimiste de la dilution totale de la culture classique dans la société de consommation et les médias de masse… Et les élèves des grandes écoles ou prépas littéraire seraient les derniers représentants d’un monde en perdition ?

          Il est vrai que la massification scolaire fait des ravages, accompagnée de la prégnance des médias audiovisuels et de la « grande bouillie » culturelle des émissions tv ou du cinéma populaire (cf « le pacte des loups » , « Kingdom of Heaven » le récent « Jaquou le croquant » – Oui on m’a infligé cela, mais c’est intéressant au final) qui tendent à mélanger les époques et sont porteurs de confusion sur le plan historique.

          En même temps, si vous regardez bien cette fameuse télévision, il n’y a jamais eu autant de programmes culturels disponibles. Les musées n’ont jamais été aussi visités, les livres se vendent mieux que jamais (en nombre et diversité). Mais toujours par les mêmes…

          Je ne serais pas si catégorique que vous, même si votre propos a évidemment une résonance chez moi. Je vais y réfléchir un peu plus… 🙂

  11. Un grand bravo pour la virtuosité de vos plumes. C’en est trés sincèrement étourdissant !
    Nouvelle preuve que la classe moyenne est le grand pourvoyeur d’énergie intellectuelle de toute sociétés, associant la capacité de révolte des humbles et la culture des élites !
    Pour paraphraser Nietsche ( oh le gros nom ! )et ainsi résumer mon sentiment face à tout ce qui semble toucher à une certaine vérité ( dont l’article de Cycéron ) :
    Ne pas rester au fond des vallées,
    Ne pas viser les sommets,
    Le plus beau point de vue sur le monde est à mi-pente.

    1. Merci Martin !

      C’est là le plus beau compliment qu’on m’ait fait jusqu’ici !

      J’adore votre citation, c’est exactement mon credo. La vérité se trouve souvent au milieu. C’est moins flamboyant, c’est moins attirant et c’est pour cela que c’est beaucoup plus dur d’accès… (« la porte étroite » dirait Gide)

      Cela me rappelle cette histoire bouddhiste du jeune apprenti qui s’entraîne très durement à la médiation et arts martiaux pour atteindre la sagesse du grand Bouddha. Un jour il demande à son maître : « quand atteindrai-je la félicité et la vérité du grand Bouddha maître ? »Ce dernier fronce les sourcils et lui dit : « avec beaucoup de travail quelques années »

      Le disciple se remet alors très durement au travail, s’inflige des exercices physiques très difficiles, des méditations et jeûnes drastiques. il revient deux ans après voir son maître. « Grand maître combien de temps encore ? »
      Ce dernier le regarde avec peine et lui dit « dix ans au moins »

      Le disciple très déçu sur le moment se remet pourtant au labeur et mène alors une vie d’ermite pauvre, seul et toujours à moitié affamé. Dix ans plus tard il retourne enfin voir son maître en haillons : « alors quand ? »

      Ce dernier le regarde avec tristesse et lui dit alors : « jamais… »

      Cette histoire résume bien des erreurs de notre société actuelle, elle montre que la vérité ne se situe pas dans l’extrême d’une part. Et pas plus non plus dans l’apparence ni la forme mais dans la sincérité du fond, l’authenticité de la démarche, quels qu’en soient finalement les moyens. Ce qui rejoint ma vision de l’art aussi en général 🙂

      Bien cordialement

      Cyrille

  12. Bonjour,

    je suis en total désaccord avec votre propos.
    On ne me fera jamais croire qu’un tag est aussi travaillé qu’un Van Gogh, que les textes de Sexion d’assaut sont similaires à ceux de Baudelaire, que le slam est à la hauteur de Victor Hugo.
    A mon sens, il doit y avoir une « bonne »culture, elle s’inscrit dans les grands classiques qui permettent la transmission des grandes oeuvres françaises et du patrimoine culturel.

    La culture est bourgeoise et dominante, c’est un pléonasme comme le soulignait Roland Barthes.
    On se trouve dans une époque consensualiste et égalitariste, tous les jugements de valeurs sont bannis tandis que c’est le propre d’une civilisation, le jugement et la hiérarchisation.
    La culture ce n’est pas un droit, c’est un devoir, sans volonté personnelle rien ne se passe.
    Bourdieu et son détermisme socialisant représente une oeuvre satisfaisante pour ceux qu’on appelle les « bourgeois » , tout ça donne aux classes populaires une bonne excuse pour ne pas être cultivé.

    Je vais sans doute me faire lyncher 🙂
    Merci de m’avoir lu,

    1. Bonjour Léo,

      Non, non, je ne vais pas vous lyncher. C’est un lieu de discussion et le désaccord vaut mieux que l’indifférence 🙂

      Je ne sais si vous m’avez bien lu : ce que vous dites rejoint partiellement mon propos. Je précise « tout ne se vaut pas » et le « big deal » ne vaut pas la « République » de Platon.

      Par ailleurs je concède à certains produits culturels une valeur intrinsèque supérieure, mais pas forcément reliée à la culture classique : « Si supériorité d’un objet culturel intrinsèque il y a, elle ne peut provenir que dans son degré de structuration mentale, sa capacité à organiser et libérer la pensée, l’imaginaire, l’émotion en amont. »

      En réalité, en dépit de mon titre « accrocheur » (technique philosophie classique de « Dieu est mort « à l »enfer c’est les autres »), j’établis bien une hiérarchie. Mais je réfute en revanche le monopole de la culture à la seule culture savante et scolaire. Mon texte est plutôt un appel à ouverture et à la lucidité vis à vis des normes sociales, relatives dans l’espace et le temps.

      Je ne suis pas déterministe et je ne cite Bourdieu que pour certains aspects que je trouve toujours opérants. Mais ne vous y trompez pas, cette culture savante j’y tiens, pour toutes les catégories sociales !

      Quant à l’excuse des classes non cultivées… Vous trouvez qu’elles sont en faute ? Moi je constate qu’elles sont surtout victimes de l’inégalité scolaire et sociale. Les chiffres battent en brèche cette fameuse « méritocratie », et ce n’est pas un concept socialiste, ça s’appelle la réalité (même si des contre-exemples existent heureusement)

      Cordialement

      Cyrille

  13. Bravo.
    Des idées, ou plutôt des sensations que je n’arrivait pas à partager autour de moi, vous avez réussi à m’aider à y voir plus clair.

    Certains commentaires semblent indiquer que les gens, même très cultivés, ont encore besoin d’apprendre à lire!

    Il y a bien une ou deux points que j’aurais aimé discuter, comme « l’inventivité de Picasso » et autres : Un artisan ou un mécano inventif qui résout des problèmes avec les moyens du bord ne sera pas considéré comme un « artiste », mais je comprends bien qu’il s’agit d’un autre sujet!

    1. Bonjour Salvator,

      Merci, ravi si ma réflexion fait écho à la votre

      Oui je soupçonne certains de lire en diagonale et de ne retenir finalement que le titre et le chapô… 🙂

      A propos de Picasso, cela rejoint un des points que j’aborde : celui de la validation institutionnelle d’une part, et d’autre part, celui du critère d’originalité (et là nous sommes dans la standardisation de la pratique du mécanicien). Il y a aussi un autre critère important selon Kant qui distingue l’art : la gratuité, la « finalité sans fin ».

      C’est à dire que l’art doit être conçu pour lui même, sans aucun critère « utile », même pas être beau et surtout pas décoratif (même s’il s’avère souvent que c’est le cas in fine, ce ne doit pas être le moteur de la création)

      C’est un autre débat passionnant sur l’origine du beau que je poursuivrai volontiers avec vous plus tard 🙂

      Cordialement

      Cyrille

  14. Cet article est d’une grande acuité, merci pour cette lecture.
    Je crois qu’il faut faire la distinction, de la part de la société comme des médias, entre une volonté d’instaurer, effectivement, une « échelle normative » (pour reprendre vos termes), et une autre de simplement tenter d’ouvrir l’esprit des gens, de ne jamais les habituer à se contenter de peu, et de leur permettre de pousser des portes. « Tirer vers le haut » est peut-être le genre d’expression qui indique un sentiment de supériorité, mais en tous cas, apprendre la curiosité à autrui me semble une noble mission ; s’il est tout-à-fait acceptable de regarder de la télé réalité, ne peut-on pas souhaiter inciter autrui à ne pas se contenter que de ça ? Toute la question est de savoir le faire sans imposer une certaine idée de la culture, et j’avoue que c’est une ligne difficile à franchir de mon point de vue.
    Vous dites aussi : « un jugement qui reste fondamentalement subjectif, d’où la tolérance nécessaire face au jugement de goût », mais de part la subjectivité vis-à-vis du sujet, la tolérance est nécessairement plus difficile, car il y a, dans une certaine mesure, un engagement émotionnel, quand la tolérance aux goûts des autres est une action purement intellectuelle. On ne peut pas forcer la tolérance envers les « goûts pourris » des autres, même si elle s’apprend…

    1. Merci Ladyteruki, arbre brillant 🙂

      Il n’y a pas volonté normative, le processus est inconscient et procède selon moi, d’un besoin de domination social. Celui qui dit le beau donne le tempo social, comme hier le religieux disait le juste et le philosophe le vrai.

      D’accord avec vous, il ne faut pas se méprendre et tomber dans le relativisme absolu. Tout ne se vaut pas, c’est un point essentiel de ma réflexion. C’est, une fois encore, une question d’équilibre d’une part mais aussi de diversité. La fameuse culture générale est importante en termes d’ouverture sur le monde et sur les autres, ce qui implique de savoir concrètement ce qu’est la télé-réalité ou le « gangnam style ».

      En revanche, il y a des contenus, des informations plus structurantes que d’autres, à commencer par la maîtrise des fameux concepts, si chers aux philosophes et hélas assez peu connus des autres.

      Vous répondez vous mêmes à cette contradiction : cela s’apprend… 🙂
      On peut regretter pour autrui qu’il ne sache profiter des bienfaits dont on s’estime pourvu, mais on ne saurait en aucun cas le lui reprocher.

      C’est le rôle des pédagogues de tirer vers le haut (ou vers ailleurs, en tout cas), jamais de sanctionner. Par ailleurs, avoir des convictions n’empêche pas le salvateur « doute ». Il se peut que je me trompe… A fortiori en des matières si personnelles que le jugement de beau.

      Bien cordialement

  15. Un article fort bien écrit et qui dénote beaucoup de vérités.
    Toutefois, je suis en désaccord avec vous sur certains points.

    S’il y a bien encore de nos jours une lutte des classes (qui s’opère tant sur les inégalités de revenus, de statuts, et de culture), on ne peut pas affirmer qu’il n’y a pas de « bonne » culture.
    Vous-même nuancez vos propos en admettant la hiérarchisation de la culture.

    Dire qu’il y a des enseignements sociologiques à tirer d’une émission telle que « Secret Story » vous met en porte-à-faux.
    Le téléspectateur lambda (la jeune adulte de 20-25 ans avec un bagage scolaire Bac/Bac+2, à titre d’exemple) tire-t-elle un enseignement sociologique d’une telle émission ? Non, bien sûr que non.

    En revanche, je suis tenté de penser que ce genre d’émissions enferme les « classes inférieures » dans un carcan.
    On pousse la Plèbe à réclamer du pain et des jeux, on leur apprend à se défaire de leur faculté de penser. Combien de fois ai-je entendu : « Non mais je regarde ça parce que j’ai pas envie de me prendre la tête ! »

    Nous vivons à une époque où la culture « noble » (pour reprendre vos termes) est accessible à tous. Les ménages des classes populaires ont tous ou presque un poste de télévision et un accès à Internet.
    Les programmes télévisés ne sont pas conçus « par le peuple et pour le peuple ». Il faut donc les éloigner de cette culture, ou mieux, faire en sorte qu’ils la rejettent.

    Ainsi les chaînes privées (telles que TF1 et M6) se cantonnent à des programmes d’une vacuité intellectuelle presque absolue où l’anti-intellectualisme est érigé en mode de vie.
    Seuls les « magazines d’information » donnent une impression d’enrichissement culturel.

    « C’est trop compliqué », « C’est pour les intellos », là sont les phrases maîtresses qui permettent à l’élite d’asseoir sa domination. En éloignant les classes inférieures de leur culture et en les dépossédant de leur faculté de penser par eux-même, elle légitime sa supériorité : « laissons aux érudits le soin de décider ce qui est bon pour nous car nous ne sommes pas en mesure de le faire ».

    Mais la culture se saisit ! Comprendre les fondements de l’économie, connaître l’histoire, s’ouvrir à la musique dite « savante », enrichir sa culture générale, aujourd’hui il n’est plus question ni de diplôme ni de classe sociale. Mais on érige des codes, on créé des barrières, pour ne pas laisser n’importe qui s’approprier cette culture.
    En abêtissant les masses, en leur faisant croire que « le bonheur c’est d’avoir de l’avoir plein les armoires », en leur faisant réclamer « Panem et circenses » (comme j’aime le dire), on garantit ainsi la position dominante d’une minorité d’érudits.

    Un de mes supérieurs (CSP+, forcément) a pour habitude de dire : « Une culture commune aplanit les différences sociales. »
    Il a cent fois raison.

    1. Merci Sébastien !

      Mon titre est volontairement exagéré pour mettre en exergue le côté normatif du « bon goût ». Mais vous avez noté que je ne prétends pas que tout se vaille. Kant a mieux que tous selon moi expliqué ce qui fait la spécificité du beau en matière artistique (« critique de la faculté de juger »), ce qui revient à déterminer les critère qui fondent l’oeuvre d’art et donc le jugement de goût.

      Je pense comme vous que le « Big Deal » ou la « Star Ac' » ne sont pas les oeuvres les plus à même d’ouvrir l’esprit à de nouvelles idées, à de la réflexion et à une quelconque emprise sur la vie. Je suis d’accord avec vous pour dire qu’il faut déjà une certaine culture et un socle d’instruction minimum (y compris acquis parfois de manière autodidacte) pour pouvoir les regarder avec un oeil décalé, éventuellement porteur de sens.

      Je partage aussi finalement le triste constat que ces programmes anesthésient leurs spectateurs dans une torpeur qui favorise la stabilité du système : le « panem et circenses » des temps modernes.

      J’ai cependant à mon tour deux objections à vous faire :

      – Ce n’est pas l’objet d’un projet politique ni de contrôle des foules « calculé » (de type « Hunger Games » ou « Roller-Ball »). Mais le résultat d’un mécanisme cynique et froid qu’on appelle le capitalisme. Je donne au peuple ce qu’il demande pour vendre de la pub, ou du « temps de cerveau disponible » comme le disait fort honnêtement l’ancien patron de TF1 (une honnêteté qu’il a du regretter, vu la réaction que sa petite phrase a suscitée).

      – Le problème ne vient pas des médias mais se situe bien plus en amont, dans notre système politique : l’école, la répartition fiscale, les règles qui régissent la finance et les entreprises, l’organisation politique. Autant de facteurs de réplication sociale et d’aggravation des inégalités socio-culturelles. Une fois sortis du système scolaire sans bagage, sans instruction, dans un environnement social pauvre et sans relations, il est quasiment impossible de s’élever ni économiquement, ni culturellement.

      Et vous pourrez multiplier à l’envi les programmes culturels en prime-time. Cela n’aura d’autre effet que d’éloigner les classes modestes de la télé, pour les amener à consommer d’autres médias plus « fun ». Comme disait Platon, la connaissance est douloureuse (mythe de la caverne), sauf à y être habitués, et les gens ne sont pas maso.

      En revanche, il y a une solution partielle : vulgariser l’info pour attirer le plus grand nombre vers l’intelligence, par la bande. Edulcorer la forme pour promouvoir le fond. Ce n’est pas un aveu d’échec ni une démission, mais un impératif démocratique pour « limiter la casse ». C’est ce que nous essayons de faire avec Quoi.info et Askmedia.

      Mais je ne me leurre pas : sans réforme politique globale, pas d’élévation culturelle possible de la population dans son ensemble. Toutefois, les médias, par leur pédagogie et leur rôle g’agenda stetting (cf McCombs and Shaw 1968) peuvent aussi appeler indirectement ces réformes politiques.

      Voyez, je n’ai pas baissé les bras ! 😉

      Merci pour ce très pertinent commentaire !

      A bientôt

      Cyrille

  16. Bonsoir, effectivement il s’agit d’un bon article entrecroisant connaissances, syntaxe, philosophie et sociologie. Je rejoins tout à fait « clok » et que donc toute personne indépendamment de sa classe sociale peut s’instruire surtout dans notre société actuelle avec les livres, les médias, etc. J’ai également un exemple qui déroge aux statistiques. Mon grand-père maternel était un ouvrier mais qui était très ouvert. D’après ma mère, il s’intéressait même aux sciences (Mathématiques/Physique) et était grand lecteur. Je pense que ceci fait partie malheureusement d’un stéréotype. Je crois aussi que tout est question de volonté et ce, indépendamment des facultés cognitives innées. Comme dirait Kant : « Agis toujours d’après une maxime pour que tu puisses en ériger une loi universelle ». Je pense et j’en suis convaincus qu’il est aussi intelligent et ouvert que le reste de ma famille (plutôt issue de milieux aisés). Seulement l’environnement social joue aussi un grand rôle pour l’éducation et pour la prédisposition à la culture. Cordialement, Antoine Coeuré.

    1. Merci Antoine pour ce commentaire !

      Je ne crois pas au déterminisme, ni social, ni de quelque nature que ce soit. Mais il y a les probabilités… Et les statistiques sont cruelles : vôtre grand-père est une exception et il a bien du mérite ! Je connais aussi quelques autres exemples.

      Malgré tout, je crois hélas que non, tout n’est pas question de volonté (ça c’est le mythe américain du « qui veut, peut »), il y a des chemins faciles et des chemins si tortueux, que très peu réussissent. Essayez donc de prendre la direction d’une grande entreprise si vous n’avez pas fait une grande école…

      Ce qu’il y a d’injuste avec cette théorie de la volonté, c’est qu’elle est culpabilisante : si vous ne réussissez pas, c’est de vôtre faute ! Il est évident que sans volonté ténacité, travail et un minimum de capacités, vous ne pourrez réussir. Mais l’inverse n’est pas toujours vrai, malheureusement. Si vous naissez dans une famille pauvre, illettrée, fréquentez des établissements de ségrégation scolaire, devez vous occuper de vos frères et soeurs etc. vous n’avez quasiment aucune chance de vous hisser en haut de l’échelle sociale. Si vous bénéficiez à la naissance de tout le contraire, vous avez toutes les chances d’y parvenir (et pour le coup, si vous n’y parvenez pas, c’est souvent de vôtre faute !)

      Sur les capacités intellectuelles innées ou acquises, je dirais qu’il y a des dispositions et de formes d’esprit différents. Je suis lent et mauvais en réflexion mathématique et logique pure. Mais cette lenteur est une force pour comprendre et maîtriser certains concepts et creuser certaines idées… Le système scolaire valorise plus le premier que le second, pour des raisons historiques et pratiques (évaluation « neutre » des maths versus subjectivité des matières littéraires)

      Mais c’est une autre question… ^^

      Bien cordialement

      Cyrille

  17. Je cite : « Essayez donc de prendre la direction d’une grande entreprise si vous n’avez pas fait une grande école… « . Effectivement, il ne s’agit pas ici de me vanter ni de valoriser ma famille mais j’ai moi même dans ma famille une personne ayant fait Polytechnique et ayant de ce fait accès à la direction de la Banque Centrale Européenne. Toutefois, dans mon post, j’ai dis que malheureusement, la « meilleure combinaison » pour réussir dans ce système qui à tort ou à raison est une méritocratie, est d’avoir de la volonté et avoir un milieu social d’origine plutôt aisé même si heureusement que des personnes issues des milieux défavorisées réussissent quand même à avoir accès à une bonne situation professionnelle. C’est effectivement un sujet ayant une certaine forme de paroxysme puisque passionnant mais à la fois désolant (Quand on s’intéresse aux statistiques par exemple de l’accès aux grandes écoles en fonction des origines sociales (Centrale, HEC, Polytechnique, …) où la classe défavorisée ne représente que de mémoire 15-20 % . Un chiffre, par ailleurs, à la baisse au fur et à mesure des années).

  18. Cher Antoine,

    Désolé du délai de réponse !!!

    Je félicite votre parent de son grand mérite qui rappelle les grandes exceptions de la IIIe République comme Jules Grévy ou Paul Doumer ! Hélas, je ne saurais qu’abonder en votre sens ! Hélas, vous, la classe défavorisée ne cesse de baisser dans les statistiques de l’accès aux grandes écoles, au fur et à mesure des années.

    Merci pour votre commentaire,
    Bien cordialement

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